Choisis parmi l'élite intellectuelle du pays, bardés de diplômes et souvent formés aux États-Unis et en Grande-Bretagne, ces technocrates sont presque tous apolitiques, contrairement aux pratiques anciennes où seuls les hommes d'appareil - souvent corrompus - tenaient le haut du pavé dans l'exécutif.
Chaque semaine, il réunit cette équipe pendant quatre-vingt-dix minutes, juste avant la tenue du Conseil des ministres. Certains de ses membres figurent au rang des plus proches conseillers à la présidence, d'autres occupent des ministères ou des institutions clés, d'autres encore dirigent les organismes spécialisés autonomes qui lui sont directement rattachés.
Ngozi Okonjo-Iweala
Première Nigériane à devenir ministre des Finances, Ngozi Okonjo-Iweala a considérablement contribué, depuis 2003, à ce que les institutions financières internationales prennent au sérieux la volonté de son pays de réformer son économie et d'utiliser ses revenus pétroliers pour lutter contre la pauvreté. Diplômée d'Harvard et titulaire d'un PhD en économie du développement du Massachusetts Institute of Technologie (MIT), où elle a également travaillé entre 1976 et 1981, elle est entrée à la Banque mondiale comme économiste en 1982, pour ne la quitter qu'en 2003. En une vingtaine d'années de carrière à la Banque, elle a gravi les échelons jusqu'à en devenir le numéro trois, en tant que vice-présidente et secrétaire générale. Obasanjo l'a appelée à ses côtés au début de son second mandat, en juin 2003.
Juste après sa nomination, deux départements vitaux, la planification et le budget, ont failli être soustraits au contrôle de son ministère. Elle a aussitôt menacé de démissionner, obligeant le chef de l'État à faire machine arrière. Depuis deux ans, elle s'attache à mettre de l'ordre dans les finances du pays en introduisant plus de transparence, notamment en publiant dans les médias le montant des allocations versées aux États de la fédération, qui absorbent une large part du budget national. Elle a aussi fait avancer la cause de la réduction de la dette extérieure. « Elle est dynamique et brillante, c'est Madame Solutions », dit d'elle l'un de ses collaborateurs. Reconnaissable à ses pagnes traditionnels, cette battante au sourire avenant a fêté ses 50 ans le 13 juin.
Charles Soludo
L'apôtre des réformes
Âgé de 45 ans, Charles Soludo est au centre des grandes réformes de l'économie nigériane. Il a supervisé la mise au point de la Needs (Stratégie nationale de maîtrise et de développement économiques) comme conseiller économique en chef d'Obasanjo et président de la Commission nationale de la planification de juillet 2003 à mai 2004. Il a engagé, depuis juillet 2004, en tant que gouverneur de la Banque centrale du Nigeria (CBN), une profonde réforme du secteur bancaire qui, si elle réussit, fera de lui son sauveur. Professeur d'économie, il est l'un des plus fins analystes de la problématique du développement au Nigeria. Selon lui, l'économie n'a pas apporté de bénéfices tangibles aux citoyens. Et la faute en revient essentiellement à « l'État rentier qui perpétue une politique du partage des recettes pétrolières plutôt que de la production ».
Oby Ezekwesili
Transparence d'abord
Directrice de l'unité pour le contrôle du budget et des prix, elle est l'une des fiertés du pays pour son rôle dans la lutte contre la corruption, dit d'elle Obasanjo, dont elle est aussi la conseillère spéciale en matière budgétaire. Oby Ezekwesili a contribué à assainir les processus de passation des marchés publics. Son contrôle minutieux des contrats en cours a permis de découvrir un gonflement des montants, et ainsi fait économiser à l'État près de 1 milliard de dollars ces deux dernières années. Ezekwesili s'est distinguée en matière de bonne gouvernance et de développement. Diplômée en administration publique de la Government Kennedy School d'Harvard, elle a notamment été directrice financière de Transparency International. Elle a aussi exercé dans le privé comme consultante en audit comptable.
Mais elle a encore du pain sur la planche, notamment en matière de recouvrement de la part des revenus pétroliers qui revient au Nigeria dans les contrats de partage avec les compagnies étrangères. Car, en ce domaine, l'opacité règne. Or la récente adhésion d'Abuja à l'Initiative sur la transparence des industries extractives (EITI) requiert plus de coopération de la part des compagnies étrangères. Stricte et soucieuse du détail, elle a introduit une discipline rigoureuse dans la préparation et l'exécution du budget de l'État. Inutile de dire que les politiciens se méfient d'elle et que les entreprises adjudicataires la prennent désormais au sérieux. D'ailleurs, elle va faire son entrée au gouvernement dans les prochains jours.
Nasir el-Rufaï
La détermination au pouvoir
Il est l'un des Nigérians les plus brillants de la génération montante. Âgé de 45 ans, il est bardé de diplômes décrochés dans les plus prestigieuses universités américaines. Après un passage dans le privé, il est entré au service de l'État comme directeur général du Bureau for Public Enterprises (BPE), organisme chargé des privatisations. En juillet 2003, lorsqu'il l'a nommé ministre du District d'Abuja, Obasanjo lui a simplement dit : « Nettoie-moi la capitale ! » Et c'est ce que Rufaï est en train de faire. Il a d'abord « nettoyé » l'administration de la ville en supprimant 5 000 emplois fictifs et en remettant à la disposition de la fonction publique 2 000 autres employés. Puis il a commencé à « nettoyer » la ville des constructions sauvages qui y ont proliféré sur fond d'escroqueries et de corruption. Pour cela, il fait respecter le plan d'aménagement de l'agglomération, en ordonnant la démolition, effective depuis mai, de centaines de constructions dont la propriété et le permis de construire ne sont pas enregistrés. Ce qui l'oblige à s'attaquer à de puissantes personnalités. Il n'en craint pas les conséquences sur sa carrière politique. « Je ne suis pas un politicien, car un politicien ne ferait pas ce que je suis en train de faire, explique-t-il. Certaines de mes décisions d'intérêt public ont fait du bruit, mais ce sont plutôt celles d'un novice en politique. »